Colon, Vous avez dit colon ? 
Michel Lévy 22 mars 2005

  Le terme de Colon a pris un sens péjoratif à la fin du XX ième siècle, aujourd'hui on préfère parler d'expatrié en Afrique. Si les juifs vivant sur la terre d'Israël sont des colons, alors ils sont étrangers , ce qu'ils refusent vu qu'ils y cherchent leurs racines.
Dans le cadre d'un accord de paix, ne faudrait-il pas laisser des villages juifs sous le contrôle de l'État Palestinien à naître, et favoriser la mixité ethnique ? Ceci est contraire à la philosophie du mur. Mais chacun sait que la meilleure façon de se protéger d'un ennemi, c'est de s'en faire un ami.

Pour réagir :

 
 

    


    
Wikipedia donne une double définition du terme colonie :  

  1-Une colonie est une population humaine, ethniquement homogène, qui a émigré dans un pays étranger et s'y est installée durablement.

  2-Une colonie est une unité administrative sous la domination politique d'une autre entité (le plus souvent un État autonome) généralement géographiquement distante. 

  La communication arabe appelle «Colonie» les villages juif. Dans le jargon arabe, un immigrants Syrien n'est  pas un colon, sauf s'il est juif.

  
Voici par exemple une carte publiée en 1984 par un institut officiel palestinien, passia.org.  

     
Certaines «colonies» de l'époque sont devenues de grandes villes de banlieue comme Petah' Tikva qui atteint 174000 habitants.
      
Aujourd'hui on parle de Maalé Adoumim, ou de 'Har Homa, deux quartiers importants de la banlieue de Jérusalem comme des colonies, car ils ont été bâti en dehors de la frontière de 1967. Sharon, vient de décider de renforcer la population de Maalé Adoumim, en même temps qu'il donnait l'ordre d'évacuer Gaza.  

 

 

 

 

 

 

        Lorsqu'on parle de colonialisme, on pense avant à l'unité administrative.  Le Yshouv (*) juif de Palestine n'a pas été une colonie, car le mouvement sioniste n'a jamais été placé sous la domination d'une puissance politique étatique quelconque. La Côte d'Ivoire était une colonie Française, le Canada une colonie Anglaise, mais le sionisme ne s'est jamais inscrit dans un logique impériale quelconque. 

          La première définition est plus proche de la réalité du Proche Orient, les Yshouvims, telles que je les ai vus au Nord de Jérusalem, possèdent une population homogène malgré des origines géographiques très variés. Leur cohésion très forte se base sur une culture, une histoire, une langue et une religion commune.
           

  
     Aujourd'hui, ce que certains appellent les colons,  sont très souvent des émigrants encouragés à s'y installer par des aides divers, mais aussi souvent des israéliens de souche venus ici pour des raisons idéologiques (désir de peupler toute la terre d'Israël), ou économiques (les logements sont moins cher) .  

          Entre Naplouse et Ramallah, on est  sur le Territoire de la Tribu de Benjamin, ou en Samarie, donc dans la terre promise. Les «colons»  sont autant chez eux que s'ils habitaient Tel  Aviv, et plus qu'à Ashdod qui était Phillistin aux temps biblique.
      

 (*) Yshouv terme hébreux désignant une implantation. On appelait Yshouvim l'ensemble des implantations juives de Palestine avant la création de l'État d'Israël, c'est par ce terme que les habitants des territoires appellent les villages qu'ils habitent au delà de la ligne de démarcation de 1948
          Il n'y a pas de différence de légitimité entre les villages juifs de Cisjordanie, de Galilée, ou de la plaine côtière. Certains bédoins protestent contre des implantations dans le Négev, les villageois arabes de Galilée ne voient pas tous d'un bon oeil la présence de nouveaux villages exclusivement juifs à côté les leurs. Pour eux, tous les juifs venus habiter la région sont des colons. Il suffit de se promener sur Internet pour en être convaincu.

         Si les juifs sont étrangers en terre sainte, alors, les Yshouvims sont des colonies.     Refuser toute présence juive en Samarie, au niveau des principes c'est refuser la présence juive partout ailleurs. 

   
 
     Aujourd'hui, l'évacuation israélienne de la bande de Gaza semble acquise, mais celle de Cisjordanie ne l'est pas, et pour cause, ce seraient des centaines de milliers de personnes qu'il faudrait déplacer, cette hypothèse fait frémir, et tous les habitants juifs des territoires manifestent leur solidarité avec ceux de Gaza, comme le propriétaire de cette voiture qui hisse un drapeau orange, sur lequel on peut lire «Samarie avec le Goush Katif».

          Les nationalistes juifs considèrent donc cette terre comme leur, et ont bien l'intention, de toute la conquérir en installant des «mobile-home» sur tous les sommets disponibles. Certaines personnes ont acheté leur maison, puis des mobiles homes. Ils louent leur propre maison, afin de pouvoir en pionnier s'installer dans un endroit qu'ils jugent stratégique. Ainsi une implantation, ce n'est pas uniquement un village ou un bourg  habité par des  «rurbain», c'est à dire des citadins venus vivre à la campagne tout en travaillant en ville (qui généralement est à l'intérieur des frontières de 1967), mais un bourg avec une multitude de hameaux et qui occupe une superficie maximu.

          A Eli, comme dans tout le district de Benjamin,  les villages possèdent une communauté  importante d'immigrés récents, et on entend beaucoup parler en français, parfois anglais ou russe et tout le temps... hébreux. S'il existe dans le village des gens non religieux, ils sont discrets, car tout le village vit au rythme de la Thora. 

          Ne cherchez pas une école laïque, il n'y en a pas. Les cours commencent par la prière, les garçons sont tenus d'avoir un chapeau sur la tête, et les filles sont priées d'avoir une jupe longue. Si un débat sur le voile devait avoir lieu à Eli, ce serait «Devons nous accepter une fille qui refuse de porter une jupe longue en classe ? » Si l'école maternelle est mixte, à partir du primaire, il y a école pour filles et pour garçons, la piscine a ses heures pour les uns et les autres. 

         L'école est très gaie, les chefs d' oeuvres des enfants tapissent les murs des classes. A l'école primaire, de grands panneaux thématiques illustrent les travaux des enfants : la ronde des saison, le système solaire, le cycle de l'eau, les fêtes religieuses. On y trouve pas de messages «politiques». 

           Pour les plus grands, il y a la Yeshiva : les jeunes gens passent leur bac à 18 ans environ, puis, ils sont astreint à trois ans d'armée, après l'armée, ils éprouvent le besoin de changer d'air, à Tel Aviv ou à Haïfa, ils prennent un billet d'avion et font une grande virée de plusieurs mois très loin, aux Indes, en France, en Amérique. Mais les jeunes des milieux religieux passent un an dans des Yeshivoth (pluriel de Yeshiva), où ils étudient à temps plein le Talmud.  

   Le Chabbat, tout est calme, il n'y a plus de voitures, sauf sur la grand' route en bas, celle qui va de Naplouse à Ramallah et qui est empruntée par les palestiniens. A Eli, la «Makoleth» (superette) qui ne vend que des produits «cacher» est fermée, par contre les cinq synagogues sont ouvertes. En sortant de l'une d'elle j'ai entendu le muezzin du village d'à côté qui prenait le relai du rabbin. 

         Dans le jardin public, l'après midi, il y a foule, toutes les mamans sont là dès la sieste terminée. Vers 17 heures, j'y ai vu arriver un rabbin en costume noir, avec un chapeau noir, une grande barbe, et un  nez très rouge, et très gros, la couleur Bourgogne était due à «tâche de vin» que sa maman lui avait donné à sa naissance.  A peine le personnage s'était-il assis que tels des moineaux, tous les enfants du jardin se sont précipités autour de lui en s'asseyant par terre dans l'herbe. Le vieil homme leur parla alors Thora, puis il leur raconta une belle histoire, et enfin remis à chaque spectateur un gaufrette au chocolat, et aussitôt la volée s'est dispersée dans le jardin.... à leur départ, je n'ai trouvé qu'un seul papier argenté d'emballage par terre.

       Les villages juifs forment des réseaux, avec des écoles communes à plusieurs villages, il y a une forte dépendance entre les implantations, il ne viendrait à l'idée de personne  d'accueillir de petits arabes à l'école maternelle d'Eli, même s'il n'existe pas d'école maternelle dans les villages arabes voisins. Il existe un village arabe qui a opté pour Israël, ses habitants ont demandé à être intégré dans le réseau d'assistance scolaire.  Les psychologues scolaire qui ont ce village dans leur tournée sont étonnés de voir que la place de l'enfant n'est absolument pas la même dans la société arabe et juive. Cela nous renvoi à la réflexion de xx Sibony et cela montre que la confrontation des cultures peut enrichir tout le monde.   

        J'ai essayé de vous montrer par quelques exemples ce que peuvent ressentir les habitants d'Eli, ils vivent à leur façon sur leur terre, selon leur rythme, leur langue, leur culture, j'en suis arrivé à la conclusion que la situation est loin d'être désespérée. 

       Il sera probablement indispensable de cadrer le développement des implantations, de mettre un frein à cette volonté de tout conquérir.  Il faudra aussi que chacun s'ouvre, que des arabes puissent s'établir à Eli, et que les juifs puissent venir dans des villages arabes. Il faudrait que dans les zones ou les arabes sont largement majoritaires, ils puissent faire la loi, et que cette loi s'impose à tous. La présence de villages juif en terre arabe n'est pas plus choquante que celle de villages arabes en terre juive. Maintenir des villages juifs dans le futur état Palestinien serait même à mes yeux un gage de paix à long terme.