facebook

 

Mivy décoiffe,
car il a été conçu par un chauve !

m'écrire : a   adresse : https://www.mivy.fr/


La loi dans le judaïsme


Mardi, 06-Avr-2021
Pour réagir, https://www.facebook.com/midith
ou s'abonner à la liste de diffusion : michel.levy@orange.fr


Pour naviguer, cliquez sur le nez
historique => journal 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2020, 2021 2022 2023
trefle
Pour commenter...
 
facebook
 Selon la tradition juive, les lois écrites et orales ont été données à Moïse et transmises jusqu'à nos jours, la loi est éternelle et immuable, pourtant son adaptation est indispensable et a toujours été d'actualité. Ce sont donc les mêmes principes et les mêmes méthodes que les rabbins utilisent pour essayer de déchiffrer et mieux comprendre le message divin dans un univers en perpétuelle mutation.
L'étude ci dessus s'inspire très largement des écrits de personnes plus compétentes que moi et appartenant à des branches très divers du judaïsme.
Vous trouverez plus bas quelques articles que j'ai pillé pour vous afin de réaliser cette synthèse.
 

La torah du Sinaï

La tradition juive explique que la Thora a été donnée à Moïse sur le mont Sinaï, et qu'il y est resté 40 jours, pendant lesquels, il a reçu la loi orale.

A plusieurs occasions, l'Ecriture fait allusion à cette loi orale.

«Telles sont les ordonnances, les institutions et les doctrines que l'Eternel fit intervenir entre lui et les enfants d'Israël, au Mont Sinaï, par l'intermédiaire de Moïse» (Lévitique 26 46). (Idem Exode 24 12 – Deutéronome 9, 10 Sifra ibid.)

Nos maîtres interprètent ces versets comme se rapportant à l'ensemble de la Thora transmise au Mont Sinaï. D'ailleurs, de nombreux commandements ne peuvent être compris que par les explications de nos Maîtres, par exemple, on voit l'allusion de la Thora écrite concernant la Thora orale quand il est question de l'abattage rituel (che'hita).

«Tu pourras sacrifier de la manière que Je t'ai prescrite de ton gros ou menu bétail (…) et en manger dans tes villes tout comme il te plaira» (Deutéronome 12 21).
Or, l'Ecriture ne mentionne nulle part les prescriptions concernant la che'hita. Il est donc question ici de la Thora orale où ces lois sont effectivement mentionnées.

La première Michna du traité Pirkei Avoth, «Maximes des Pères», nous enseigne que les principes d'éthique ne peuvent être véritablement découverts par l'homme, trop influencé par les modes, ses intérêts ou son caractère. Seul le message divin peut nous dévoiler les vraies valeurs morales…

Nous lisons dans le Talmud :
« R. Lévi bar 'Hama dit au nom de R. Chimon b. Lakich :
"Que signifie ce verset : « Je te donnerai les Tables de pierre, la Torah et le commandement que j'ai écrits pour les enseigner » (Exode 24,12) ?
-  Les Tables, ce sont les dix paroles (Dix Commandements) 
- la Torah, c'est le pentateuque
-  Le commandement, c'est la Mishna ;
- Ce  que j'ai écrits, ce sont les Prophètes et les Hagiographes ;
- Pour les enseigner, c'est le Talmud.
Il nous enseigne qu'ils ont tous été donnés à Moïse au Sinaï » (Berakhot 5, a)

 

Comment la loi orale a été transmise

Le Pirke Abot (traité des principes ou des pères) commence ainsi :

1. Moïse reçut la Torah au Sinaï et la transmit à Josué ; Josué la transmit aux Anciens, les Anciens aux Prophètes et les Prophètes la transmirent aux Hommes de la Grande Assemblée. Ceux-ci énoncèrent trois principes : soyez circonspects dans le jugement, formez de nombreux disciples et établissez une clôture autour de la Torah.

.

(א) משֶׁה קִבֵּל תּוֹרָה מִסִּינַי, וּמְסָרָהּ לִיהוֹשֻׁעַ, וִיהוֹשֻׁעַ לִזְקֵנִים, וּזְקֵנִים לִנְבִיאִים, וּנְבִיאִים מְסָרוּהָ לְאַנְשֵׁי כְנֶסֶת הַגְּדוֹלָה. הֵם אָמְרוּ שְׁלשָׁה דְבָרִים, הֱווּ מְתוּנִים בַּדִּין, וְהַעֲמִידוּ תַלְמִידִים הַרְבֵּה, וַעֲשׂוּ סְיָג לַתּוֹרָה:

Seul Moïse a reçu un message révélé, pour la suite, il ne s'agit que de transmissions humaines.

La Thora dont parle notre Michna et qui a été dévoilée au Mont Sinaï, c'est l'ensemble formé par la Thora écrite (Thora chebi'htav) et la loi orale (Thora chebéalpé). Cette loi orale contient d'abord l'interprétation de la Thora écrite, et elle nous révèle les règles, et les méthodes pour aborder les textes sacrés.

La transmission s'est faite par les prophètes, et le bouche à oreille, de père en fils, "Tu en parleras à tes enfants" sans contrôle d'aucune autorité officielle.

Ezra hasofer, après avoir pris la tête de 5000 juifs de l'empire Perse, a regagné la Judée, et a réuni la Grande Assemblé Knesset HaGuedolah  כְּנֶסֶת הַגְּדוֹלָה vers -410 jusqu'à -300. Environ 120 membres, comme la Knesset actuelle !
A partir de ce moment, ce sont les sages qui fixent les lois.

Les zougoth (paires) composé du Grand prêtre et du président du tribuanl (Ab beit din) on transmis le savoir à ceux qui devaient écrire le talmud.

Les Tannaïm (on en connait environ 120), ou répétiteurs habitaient Jérusalem, avant la destruction du temple, puis sont partis à Yavné  (Yoh'anan ben ZaKaï), de Hillel à Yehuda à Nassi qui a conclu la Michna   De l'an 2 à 200. Complétée par les Amoraïm Qui depuis Tsipori ou la Babylonie ont terminé les deux Talmud de Jérusalem et de Babylone en y ajoutant la Guemara

Les Gaonims depuis Bagdad ont vu arriver les musulmans, et on suivi l'expansion et leur déclin, ils ont fait la loi jusqu'à l'époque de MaImonide. qui a tenté de concilier raison et foi.

Le Arbaa Tourim (« les 4 colonnes ») ou plus communément appelé « le Tour », est un recueil de lois juives, écrit par le rabbin Yaakov ben Asher (1270-1340), environ cent ans après le Mishneh Torah de Moïse Maïmonide.
Il servit de base au Choulhan Aroukh, code de Loi juive compilé par Rabbi Yoseph Caro au xvie siècle. Moché Isserles de Cracow (le Rama, 1525-1572) a écrit l'adjonction achkénaze à ce code

 

La thora est éternelle, il n'y a qu'une seule révélation

Meguila 19b : Rabbi Hiya fils de Abba a dit au nom de Rabbi Yohanan : Quelle est l'interprétation du verset ''et sur elles (se trouvent) toutes les paroles que Dieu vous a adressées au mont Sinaï'' (Deutéronome 9,10) ? — cela enseigne que le Saint béni soit-Il a montré à Moïse toutes les précisions de la Tora, celles des scribes (Sages) et ce que les scribes innoveront dans le futur.

Maïmonide nous dit dans le Mishneh Torah, lois des fondements de la Torah chap. 9, 1 « Une chose claire et explicite dans la Torah est d'ordre éternel, […] comme il est dit :Tout ce que je vous ai prescrit,observez-le sans rien y ajouter, sans rien y retrancher(Deu. 13, 1). Il est dit également :[…] les choses révélées sont pour nous et nos enfants pour l'éternité, pour accomplir toutes les paroles de cette Torah(ibid. 29, 28). Nous sommes donc tenus d'appliquer toutes les paroles de la Torah pour l'éternité. »

Ceci figure dans les treize articles de foi :

8- Que la Torah que nous possédons est celle transmise à et de Moïse, notre maître, sur lui la paix.

9- Que cette Torah ne sera pas changée contre une autre loi ou doctrine. ( plus aucune révélation n'aura pour objet d'apporter une nouvelle Torah, Allusion au Nouveau Testament et au Coran)

Le Talmud (Baba Metsi'a59, a) rapporte une discussion au sujet d'un four fabriqué en tuiles découpées et liées avec du sable afin de savoir s'il  est soumis aux règles de l'impureté. R. Eliezer soutenait, à l'encontre des autres sages, que le four est pur. Lorsque R. Eliezer constata qu'aucun de ses arguments ne fut pris en compte, il déclara : « Si j'ai raison, les Cieux l'approuveront ». Une voix céleste se fit entendre : « Qu'avez vous à contester R. Eliezer, alors que la loi est comme lui dans tous les cas ? ». R. Josué rejeta formellement cette « voix des cieux » au nom du principe : « elle, [la Torah] n'est pas dans les cieux » (Deu. 30, 12). En effet, puisque les autres sages se sont opposés à l'opinion de R. Eliezer, il convient de se fier à la majorité, comme il est dit : « Au nom de la majorité pour infléchir le droit » (Ex 23, 2). Nous ne pouvons, par conséquent, tenir compte d'une voix céleste, pour fixer la Loi.

La torah a été donnée aux hommes, et aucune  prophétie ne peut la changer.

 

 

La Haskallah

L'idée principale de Mendelssohn (1729-1786) est que l'État et l'Église ont pour but commun de promouvoir le bonheur de l'homme dans cet ici-bas et dans l'au-delà. Mais si l'État a le pouvoir d'ordonner et de contraindre, la religion ne peut qu'enseigner et convaincre.

Dans la seconde partie de la Jérusalem, l'auteur parle de la révélation et de son contenu : contrairement aux chrétiens qui ont connaissance d'une revelation [dévoilement de la divinité], les juifs se voient prescrire des lois qu'ils sont tenus d'accomplir.

En revanche, point « de doctrines, de vérités salvifiques ou d'axiomes raisonnables éternels ». Or, ceci relève de l'autorité de la raison humaine. Et si, ajoute Mendelssohn, Dieu en avait décidé autrement, il aurait péché contres a propre bonté : « Dire que la félicité de tous les hommes dépend d'une révélation, c'est supposer que Dieu n'est pas intégralement bon puisqu'il n'a réservé la révélation qu'à un tout petit nombre d'hommes […]. Partant, même les juifs n'ont reçu lors de la théophanie du Sinaï que des lois révélées et non point de religion, car le contenu de cette dernière se confond avec les enseignements de la raison. » (1)

 

Les Mitsvot sont-elles considérées comme un but ou un moyen ?

La 'houmra observation "dure" des mitzvots, choque habituellement les non initiés, est-ce une obsession maladive portant sur les petits détails de la vie religieuse, au détriment des grands idéaux et des valeurs fondamentales ?
Est-ce une sorte de repli stratégique de la religion sur les seules obligations rituelles et cultuelles (mitsvot ben adam la-makom), aux dépens des mitsvot interpersonnelles et sociales (ben adam la-'havero) ;
Au final, la 'houmra déboucherait paradoxalement sur une religion qui serait tout à la fois étriquée et invasive :
* Étriquée, car oublieuse des complexes réalités humaines de la vie ;
* Et invasive, car la 'houmra, est de ce que l'hyperinflation est à la vie économique, aurait tendance à s'autoalimenter : chaque nouveau sommet ne saurait être que provisoire et entraînerait la possibilité d'aller encore plus loin dans la rigueur. Concrètement, la 'houmra serait fortement soupçonnée d'étendre sournoisement son emprise sur la pratique religieuse de nombreux cercles juifs orthodoxes, au détriment d'une spiritualité plus dynamique et plus authentique ayant cours ailleurs.

Joseph Albo (~1380-~1440) va distinguer :
- la valeur absolue de l'enseignement divin — transcendant —
- de son aspect relatif —immanent.

Ainsi, en relation à l'homme, il va de soi que la volonté divine n'est applicable que dans la mesure où celle-ci parle le langage des hommes . C'est pourquoi, nous dit Joseph Albo, de même que la nourriture qui est bonne pour un enfant, comme le lait, l'est moins pour un adulte qui a besoin de pain et de viande, ainsi en est-il des lois de la Torah ;elles ont été données en relation avec l'évolution de la conscience de l'homme à travers les âges. En ce sens nous pouvons concevoir des changements possibles de la loi en fonction des époques.

Maïmonide voit l'utilité des rituels comme un moyen d'amener peu à peu l'homme vers l'essentiel du service de Dieu qui consiste en l'acquisition des valeurs morales au point d'entrevoir la quintessence de la Torah « dans une simple méditation sans aucune pratique ». Maïmonide va favoriser avant tout la connaissance des raisons des commandements afin que le mécanisme de la pratique rituelle ne fasse pas oublier l'essentiel. C'est ainsi qu'il écrit dans le Mishneh Torahqu'il est nécessaire de réfléchir afin de donner des raisons à tous les commandements de Dieu même dans les lois

Les lois, pour lui, ne peuvent pas envisager tous les cas particuliers, c'est pourquoi Maïmonide va également distinguer la généralité du commandement qui doit reposer sur des raisons bien établies, des détails qui n'ont d'autre importance que de purifier l'homme à parvenir à une dimension plus élevée (Guide III, 26), ainsi que nous lisons dans le Midrash : « Rav dit, les commandements n'ont été donnés que pour éprouver les créatures. Qu'importe en effet au Saint Béni soit-Il que l'abattage rituel soit pratiqué à la gorge ou à la nuque  » (Genèse Rabba44, 1)

Quand la loi est  claire, le rabbin décisionnaire n'a pas le choix, la banane est-elle cachère ?  mais pour l'électricité, il y a doute, peut-on l'assimiler à du feu, donc l'interdire ou l'inverse ?
Certains préfèrent un décision "dure" pour plusieurs motifs :

  • Principe de précaution
  • La difficulté pour le croyant est un challenge supplémentaire qui lui donne plus de mérite
  • Pour former l'unité d'une communauté religieuse exigeante. Exemple, à l'origine le poulet n'était pas de la viande, les Sages craignaient qu'une approche permissive   n'entraîne des erreurs chez ceux qui en viendraient à confondre la volaille avec le bétail et à réellement consommer un mélange viande-lait interdit par la Torah
 

L' innovation et la loi immuable

On peut lire dans le Talmud, Méguila 19, b
« R. Yi'hya Bar Aba au nom de R. Yo'hanan dit : Que signifie ce verset : Et l'Eternel me remit les deux Tables de pierre écrites du doigt divin et contenant toutes les paroles que l'Eternel vous adressa sur la montagne ? Ce verset nous apprend que le Saint, béni soit-il, a montré à Moïse toutes les explications des paroles de la Torah et des Sages, ainsi que tout ce que les Sages apporteront par leurs explications »

C'est ainsi que le talmud interprète le verset dans l'Ecclésiaste:

«Il est telle chose dont on dirait: 'Voyez, ceci est nouveau!' Eh bien, cette chose a déjà existé depuis toujours.» (1 10).

L'auteur du «Tossafot Yom Tov» (Rabbi Yom Tov Lipman Heller 1578-1654) fait une remarque intéressante à ce sujet, dans l'introduction de son commentaire sur les six Sédarim de la Michna.

Le Talmud emploie le terme hérahou (D.ieu a montré) et non massar (Il a transmis). Ce choix n'est pas fortuit.
D.ieu n'a pas transmis à Moïse toutes les réflexions et les découvertes de tous les sages de toutes les générations. Cela l'aurait obligé à transmettre à son tour ces notions, rendant impossible toute véritable innovation.
D.ieu les lui a fait percevoir seulement, permettant aux Sages du peuple juif de découvrir par eux-mêmes certains aspects du texte, de dévoiler, grâce à leur recherche, de nouvelles perspectives ('hidouché Thora).

La « vérité » de la halakha n'est plus fonction d'un absolu mais d'une dialectique précise pouvant évoluer en fonction des conjonctures du temps, peut aider à apporter un éclairages ur un passage du Talmud au sujet des lois reçues par Moïse qui auraient été oubliées après sa mort :

« R. Juda a dit au nom de Samuel : trois mille lois furent oubliées à l'époque du deuil de Moïse. Ils [les enfants d'Israël] dirent à Josué de les réclamer, il leur dit "elle, [la Torah] n'est pas dans les cieux" (Deu.30, 12). Samuel à qui ils la réclamèrent dit à son tour : « Tels sont les commandements » (Nombres 6, 13) : depuis que la Torah a été donnée plus aucun prophète n'est autorisé à introduire un précepte nouveau. […] On a enseigné : Mille sept cents raisonnements a fortiori et déductions des Scribes furent oubliés pendant le deuil de Moïse. R. Abahou dit : et pourtant Othniel fils de Kenaz[18] les restaura par son pilpoul (dialectique) » (Temoura 16, a)

Bien entendu, cette recherche personnelle doit suivre à la lettre les méthodes particulières d'analyse et de réflexion qui ont été transmises, cette fois, à Moïse, et retransmises de génération en génération jusqu'à nous.
Tout changement de ces méthodes d'approche invalide automatiquement toutes les conclusions que l'esprit humain croit pouvoir dégager de son analyse.

 

 Dans la tentative toujours renouvelée d'allier la puissance de l' héritage avec le devoir d'ajuster la Loi aux situations nouvelles que le décisionnaire, soutenu par un collège rabbinique qui lui accorde sa confiance, peut prétendre légitimement continuer à légiférer.

En somme, la pérennité du judaïsme a été rendue possible par un double mouvement qui peut être qualifié de respiratoire : temps d'inspiration où les poumons se déploient et s'enrichissent d'oxygène, d'opinions qui font l'objet de controverses ; puis, temps d'expiration où la codification opère une rétraction en résorbant la divergence pour préserver l'unité normative du judaïsme et du peuple juif.
Éradiquer le déploiement dans la créativité du débat conduit à la suffocation, à la sclérose. A contrario, exacerber les débats jusqu'à la discorde entraîne une hyperventilation du judaïsme qui conduit à l'éclatement de la Loi et de la communauté. C'est ce difficile équilibre qui est garant de la survie.

 

 

Le pluralisme est l'enrichissement de la sagesse

Abraham Isaac Kook (1865-1935) Voyait dans, le pluralisme la voie d'accès à la concorde :
La multiplicité des opinions qui procède des antécédents psychologiques et éducatifs est précisément ce qui permet l'enrichissement de la sagesse et provoque son déploiement. Car finalement, il en résultera que les choses seront comprises comme il se doit.
Il apparaîtra alors à tous qu'il n'était pas possible d'accéder à cette édification de la paix sans l'expression de toutes ces tendances conflictuelles (Olat Raya, I, Jérusalem, Mossad ha-rav Kook, 1978, p. 330).
C'est en ce sens qu'il faut entendre que la Loi écrite est indissociable de la Loi orale. L'oralité désigne cette fluidité dont l'instrument est la discussion, la dialectique, la confrontation des opinions.

C'est pour cette raison que la tradition (massoreth) est absolument primordiale. La Thora ne peut être appréhendée et enseignée que par ceux qui ont reçu, de leurs maîtres, les «clefs» pour ce faire. 

Et cette transmission ininterrompue remonte jusqu'à Moïse.

 

 

La loi du pays est la loi

On trouve cette règle dans  Nedarim2. qui explique que si montant de l'impôt est clairement défini et si le percepteur est un fonctionnaire, il est obligatoire de payer honnêtement ses impôts, la loi du royaume est la loi.

Autre indice dans Baba Kama, la loi juive interdit de profiter d'un bien volé, or si le Roi fait construire un pont avec du bois qu'il a volé, on peut l'utiliser, car l'expropriation dans l'intérêt public du roi est licite.

Dans Baba Batra on voit un exemple, pris en Babylonie, où il y a conflit entre le droit rabbinique pour une affaire de propriété et le droit local, c'est le droit local qui s'applique.

Dans Guittim par contre il est écrit : « Les actes établis par les tribunaux non-juifs ont force de loi à l'exception des actes de divorce et d'affranchissement des esclaves. »

La loi du royaume tire sa légitimité de son acceptation par la population. On peut en déduire une conséquence logique immédiate :
* la loi du roi n'est la loi que dans le domaine laissé par la loi juive à la libre décision de la population. On retrouve par là-même la distinction entre dine mamonot, lois sur les questions d'argent, et issour veheter, lois de l'interdit et du permis.

En effet, les dine mamonot sont un domaine de la loi juive où la communauté a un pouvoir de décision presque total. Certes nous trouvons dans le Talmud la définition d'un droit juif spécifique. Mais une communauté peut légitimement s'écarter de ces règles, dès lors qu'il y a accord de la population.
Par exemple, la Torah prévoit un statut pour le gardien d'un objet. Si l'on confie un objet à garder et si cet objet est détérioré, perdu ou volé, le gardien doit, suivant les cas, rembourser l'objet ou prêter serment qu'il l'a gardé convenablement. Mais il est parfaitement légal de convenir avec le gardien d'une autre procédure et d'échapper ainsi au statut prévu par la Torah. Il en est ainsi de pratiquement toutes les questions d'argent. De même une communauté dans son ensemble peut se donner des règles différentes de celles prévues par la législation talmudique. En résumé, en matière d'argent, la population dispose d'un pouvoir législatif. La loi du roi étant implicitement acceptée par la population, elle acquière par là sa légitimité.

Mais, inversement, les questions d'interdit et de permis échappent à la libre disposition de la population. Une communauté ne peut décider par un vote que dorénavant il est autorisé de travailler le shabbat, de manger du lapin ou des charognes ; elle ne peut changer arbitrairement les lois des mariages et divorces, ou interdire la circoncision. De plus, le détail de la législation en ces domaines est du ressort des hakhamim, des ``savants'', c'est-à-dire des autorités talmudiques, et non de la population. En conséquence, pour toutes ces questions, le principe la loi du royaume est la loi ne s'applique pas

Pour Maïmonide Un roi qui a saisi le domaine ou le champ de l'un des habitants du pays contrairement à la législation fixée est un voleur ; celui achète [ce terrain] au roi doit le restituer à son propriétaire. Le principe est le suivant : toute loi décrétée par le roi [fixant des règles de propriété] et applicable à tous et non pas seulement relative à tel individu en particulier, une telle loi est valable. Une acquisition faite en conformité avec cette loi n'est pas un vol ; en revanche, ce que le roi saisit chez telle personne contrairement à la loi connue de tous est un vol.

Aucune autorité traditionnelle importante n'a jamais admis que le principe dina demalkhouta dina puisse s'appliquer dans le domaine du issour veheter, de l'interdit et du permis.

 

La matri linéarité : la loi de Moïse a-t-elle changée ?

Dans la thora, c'est le père qui donne le judaïsme à son enfant, or la Halakha actuelle a inversé les choses, pourquoi ?

Il y a deux approches :

L'approche historique émet plusieurs hypothèses :

  • Le malheur des guerres a crée beaucoup de filles mères, par pitié pour les enfants on les a accepté dans le judaïsme :  c'est séduisant, mais on a pas de preuves
  • On est sûr du père, pas de la mère, ce motif n'est mentionné nul part
  • Le statut de Cohen va de père en fils, un Cohen n'a pas le droit de se marier avec une non juive, s'il a un fils, ce sera hors mariage, et il sera considéré comme "mamzère", batard, statut peu enviable qui lui retire la possibilité d'être prêtre, d'où la décision : Le fils de Cohen ne le sera pas et aura le statut de sa mère.
  • Influence du droit romain : Un citoyen romain transmettait le titre de citoyen romain à ses enfants que si la mère était également citoyenne romaine, si non ils avaient le statut de leur mère.
    Rien ne prouve que les talmudistes se soient inspirés de Rome.
  • Les romains risquaient la peine de mort s'ils se circoncisaient, ils ne pouvaient donc pas être convertis, et beaucoup de juifs étaient morts à la guerre, les enfants nés étaient donc souvent de père romains et non juifs, afin "de sauver la race", on a donné à l'enfant le titre de juif.  Toujours pas de preuves;

L'approche par les textes

  • Dans des cas d'extrême nécessité il est possible de légiférer en allant à l'encontre de la thora. עֵת, לַעֲשׂוֹת לַיהוָה-- הֵפֵרוּ, תּוֹרָתֶךָ Psaume 123-136   "Il est temps d'agir pour l'Eternel, on a violé ta loi"
    Il existe un interdit général d'écrire la Tora orale (Michna, Guemara, Agada). Peut-on transgresser cet interdit lorsque la Tora orale risque de sombrer dans l'oubli ?
    Mais si on avait appliqué ce principe, on en trouverait trace dans la Michna ou la Guemara
  • קידושין סח ע''ב ולדה כמותה מנלן א"ר יוחנן משום ר"ש בן יוחי דאמר קרא כי יסיר את בנך מאחרי בנך הבא מישראלית קרוי בנך ואין בנך הבא מן העובדת כוכבים קרוי בנך אלא בנה […] ולדה כמותה מנלן אמר קרא כי תהיין לאיש וילדו לו כל היכא דקרינן ביה כי תהיינה קרינן ביה וילדו לו וכל היכא דלא קרינן ביה כי תהיינה לא קרינן ביה וילדו לו

    D'où sait-on que le fils d'une étrangère est également étranger [i.e. non Juif] ? Rabbi Yo'hanan a dit au nom de Rabbi Chimon ben Yo'hay, parce qu'il est écrit : « Car il détacherait ton fils de moi » (Deut. 7, 4) ; « ton fils » qui est né d'une femme Israël est appelé « ton fils », tandis que « ton fils » qui est né d'une femme idolâtre n'est pas appelé « ton fils » mais « son fils » [à elle].

  • La douzième Michna du treizième chapitre du traité Kidouchin affirme que lorsque la mère de l'enfant ne peut recevoir de Kidouchin, l'enfant hérite de son statut. La Guemara propose deux autres versets au fondement de cette loi.

Vous trouverez sur Akadem le développement de ces arguments, ils montrent que les évolutions de la loi ne sont pas justifiées pour des raisons sociales, politiques, ou de nécessité, mais bien par des arguments puisés dans la torah. La loi peut être modifiée si on trouve des arguments dans les textes, et ceux qui les trouvent doivent avoir la compétence et les méthodes pour le faire.

Je m'interroge, l'absence de référence aux arguments "historiques" mentionnés plus haut est peut-être volontaire. Céder à la nécessité et faire évoluer l'interprêtation du message divin est prendre un grand risque théologique, j'émet l'hypothèse selon laquel, les Tanaïm et Amoraïm auraient volontairement occulté les véritables raisons de leurs décision, et auraient cherché une explication interne aux textes comme seul moyen pour faire accepter par leurs paires une initiative indispensable.

 

Le Chabbat de Leibowitz

Yeshayahou Leibowitz était un scientifique de haut niveau né à Riga et parti habiter en Israël; il était tenant de la plus stricte orthodoxie religieuse, et militant sioniste convaincu. Pour lui, l'État d'Israël devait annoncer le retour des juifs sur leur terre pour accueillir le Messie, et cet état devait être un modèle de moralité, et de piété.

L'État devait être conçu pour fonctionner selon les règles de la Torah, or c'est impossible, le pays a besoin d'électricité, de sécurité, etc et l'état ne peut pas vivre si personne ne travaille le chabbath. Confier ces tâches à des arabes, ou à des juifs non pratiquant n'est pas une solution, car c'est strictement interdit dans la torah.

Il est donc indispensable que se tienne en Israël un conseil des plus hautes sommités du judaïsme orthodoxe, et qu'ils expliquent comment appliquer la torah dans les conditions du XX  ième siècle. Cette réunion aurait du avoir lieu dès la naissance de l'État, voir la précéder. Or Leibowitz est très déçu, les rabbanims n'ont jamais eu le courage d'assumer la mission qui aurait du être la leur, ils se cantonnent dans la routine, et veulent perpétuer un judaïsme diasporique, il assimile leur attitude à de la lâcheté.

Ce n'est pas que sur ce point que Leibowitz donne des boutons à beaucoup de monde, il avait aussi une dent contre le culte de l'État et le nationalisme, n'approuvait pas la position prise par l'État vis à vis des arabes, s'opposait à toute mesure contraire à la Torah, comme le déplacement de cimetières, n'appréciait pas le chirstianisme.
  Il a été longtemps le poil à gratter de la nation.

Michel Lévy (et les auteurs cités plus bas)

   
 

Bibliographie :

Le Pirke Aboth : Michna 1, commentaires  du Gaon de Vilna Chiourim.com

La haskala : Encyclopédie et humanisme

La Halakha et son évolution, Hervé-Élie Bokobza (lien Facebook)

Plaidoyer en faveur de la 'Houmra : blog modern orthodox Emmanuel Bloch B Brown

La loi orale : Daath Haïm  Rav Eliahou Elkaïm

Entre concorde et discorde De la fécondité de la controverse d'après les sources rabbiniques Rivon Krygier

La loi du royaume est la loi, Georges Hansel (Extrait d'exploration talmudiste)

La matri-linéarité : comment l'enfant est il devenu juif par la mère :
Yona Ghertman - rabbin, docteur en droit  sur Akadem
et     Le fondement historique de la matrilinéarité juive (origine de la transmission de la judéité par la mère) Shaye J. D. Cohen (traduit de l'anglais par Elisabeth Kern)  Massorti
        
Judaïsme, peuple juif et État d'Israël,  par  Yeshayahou_Leibowitz ( J.-C. Lattès, 1985 )
Parcours de lecture  de Yeshayahou Leibowitz