La République soutien le dialogue
Michel Lévy
14/1/2003

  Deux événements apparemment  sans rapport entre eux ont défrayés la chronique en décembre 2002-janvier 2003. 

     D'abord une motion votée par l'Université Paris VI qui affirme : "le renouvellement de l'accord d'association Union Européenne - Israël, en particulier en matière de recherche (6ème PCRDT), constituerait un soutien à la politique actuelle de l'Etat israélien et serait en contradiction avec l'article 2 de cet accord ", et qui demande en conséquence le non renouvellement des accords  de coopération scientifique entre l'Union Européene et Israël. 
 
     Cette résolution a causé un émoi considérable dans la communauté juive, l'alerte avait été donnée par "Proche Orient Info", le jour même, j'ai écrits une lettre de protestation, et j'ai publié cette info sur des forum. Je n'ai pas été le seul à réagir, la réaction universitaire et intellectuelle a été très importante, et vous trouverez ici quelques unes des lettres de protestation les plus marquantes. 

    Le six janvier, une manifestation a eu lieu devant l'université de Jussieu, en présence d'un prix Nobel, de ministres et la police a annoncé un nombre de manifestant plus important que probable. Les incidents en marge de la manifestation ont été occultés par la presse. 

  L'université Pierre et Marie Curie a fait marche arrière, et a rédigé un communiqué le matin de la manifestation, communiqué tentant d'expliquer, en fait contredisant celui qui a été voté. 

   Le ministère de l'éducation et des affaires étrangères a condamné cette motion. Paris VII qui a été saisie par les syndicat a voté son incompétence. Mais surtout, elle appelle à renforcer les liens de coopération avec  les université israéliennes et palestiniennes. 

    Peu de temps après, le Rabin Gabriel Farhi était victime d'une mystérieuse agression. Un homme casqué a pénétré avant l'office à la synagogue et a porté un coup de couteau au rabbin. La blessure était plutôt légère vu que le rabbin a pu sortir le soir même de l'hôpital. Deux jours après la voiture du même rabbin était incendiée. L'agresseur aurait dit avec un accent français "Allah Akbar, on aura ta peau".    

    Le mercredi suivant, une prière solennelle a eu lieu à la synagogue de la rue Gaston de Caillavet,  en présence de Bertrand Delanoë (évidemment premier solidaire), mais aussi d'Alain Juppé, d'Edouard Baladur, Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy, Laurent Fabius etc..... 

   Quel est le point commun entre ces deux événements ? 

(  Photo sur la "Une" de Métro)

    Après un flottement, nous avons assisté à une véritable levée de bouclier de l'État contre la motion de Paris VI, qui avait été votée de façon très peu démocratique. Mise à l'ordre du jour par des syndicats, elle visait à mettre sur un plan d'égalité les islamistes et les démocrates. Dans le camp des militants palestiniens, elle soutenait  ceux   qui favorisent l'exclusion,  le boycott et la guerre contre les partisans du dialogue. 
    Le rabbin Farhi est un symbole d'ouverture, rabbin d'une communauté libérale, il organise des réunions de prières "oecuméniques" il n'est pas reconnu par les tendances les plus dures et les plus "communautaristes" des  juifs de France. Son agresseur peut être n'importe qui, arabe ou non mais le MJLF n'est pas n'importe quel mouvement. L'agresser signifie porter atteinte à la société apaisée et multiculturelle favorisée par les élus de la République. 

     Si nous avons à nous plaindre des médias, qui ont eu tendance  à exciter les antisémites arabo-berbères  de banlieue, on ne peut que se féliciter de la réaction saine et salutaire des représentant de la république en cette double occasion.  

Le  16 décembre, l'université de Paris VI votaient la motion suivante : 

COMMUNIQUE DE PRESSE DE L'UNIVERSITÉ PIERRE ET MARIE CURIE


Le Conseil d'Administration de l'Université Pierre et Marie Curie a adopté la motion suivante le 16 décembre 2002 :

M O T I O N
L'occupation israélienne des territoires de Cisjordanie et de Gaza rend impossible l'activité d'enseignement supérieur et de recherche de nos collègues palestiniens : le renouvellement de l'accord d'association Union Européenne - Israël, en particulier en matière de recherche (6ème PCRDT), constituerait un soutien à la politique actuelle de l'Etat israélien et serait en contradiction avec l'article 2 de cet accord ("Les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions du présent accord, se fondent sur le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques qui inspire leurs politiques internes et internationales et qui constitue un élément essentiel du présent accord".

En conséquence, le conseil d'administration de l'Université Pierre et Marie Curie :
1. se prononce pour le non-renouvellement de l'accord d'association U.E.- Israël 
2. demande à nos collègues enseignants-chercheurs, exerçant dans les universités israéliennes, de prendre clairement et rapidement position sur la situation concrète faite aujourd'hui tant à nos collègues enseignants- chercheurs des universités palestiniennes qu'à leurs étudiantes et étudiants et de mettre en oeuvre tous les moyens dont ils disposent pour aider les uns à exercer leur métier et les autres à étudier ;

Il mandate le Président de l'Université pour nouer des contacts avec les autorités universitaires israéliennes et palestiniennes afin d'oeuvrer dans le sens de la paix et pour qu'il soumette l'ensemble de ces questions à l'assemblée de la Conférence des Présidents d'Université.

Motion adoptée par le conseil d'administration de l'Université Pierre et Marie Curie le 16 décembre 2002 par 22 voix pour, 4 voix contre, 6 abstentions et 1 refus de vote.

     Communiqué pare-feu diffusé le matin de la manifestation. 

http://www.upmc.fr/FR/info/Actualites/318/03

A la demande de plusieurs de ses membres, le conseil d'administration de l'Université Pierre et Marie Curie a examiné le 16 Décembre 2002 la situation universitaire en Palestine. Considérant que les relations universitaires constituent un facteur d'échange qui permet de faire progresser les idées de compréhension mutuelle, il a repoussé toute idée de boycott ou de moratoire dans les relations entre l'Université Pierre et Marie Curie et les universités israéliennes. Il a donné mandat au président pour qu'il prenne contact avec les dirigeants des universités israéliennes et palestiniennes pour développer les coopérations inter-universitaires et œuvrer dans le sens de la paix.

La Présidence de l'université tient à rappeler que l'Université Pierre et Marie Curie condamne fermement les entraves mises aux libertés universitaires et les actes de terrorisme d'où qu'ils viennent. Elle considère que le développement de coopérations universitaires israélo-palestiniennes est un facteur de paix.

La Présidence s'en tiendra au seul mandat qui lui a été confié à savoir l'amplification de la coopération avec les universités israéliennes et les universités palestiniennes.

La Présidence de l'Université Pierre et Marie Curie souhaite donc que, dans le cadre de la préparation du prochain programme cadre de recherche et de développement de l'Union Européenne, et dans le respect des termes de l'accord existant, les actions puissent être étendues à l'entité palestinienne. Elle œuvre dès à présent pour que des projets associant l'UPMC à la fois à des universités israéliennes et à des universités palestiniennes soient élaborés dans les meilleurs délais.

 

Le communiqué tout à fait satisfaisant de Paris 7

Le conseil d'administration de l'Universite Paris 7 Denis Diderot, reuni le
7 janvier 2003, a vote
[...]
--- la motion suivante

39 pour, 4 contre, deux abstentions,

"Le conseil d'administration de l'université Paris 7- Denis Diderot réuni le
7 janvier 2003 a examine dans son ordre du jour une demande émanant de
représentants syndicaux relative à une "suspension des échanges
scientifiques avec les institutions universitaires israéliennes".

Le conseil d'administration tient à rappeler qu'il n'entre pas dans ses
compétences de débattre d'un tel sujet. Cette position est conforme aux
missions imparties aux universités par la loi du 26 janvier 1984 relative à
l'enseignement supérieur. Celle-ci précise dans son article 3 :"Le service
public de l'enseignement est laïc et indépendant de toute emprise politique,
économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l'objectivité du savoir ;
il respecte la diversité des opinions."

L'université a pour vocation de contribuer à la création et a la circulation
des savoirs indépendamment de toute frontière. Elle a le devoir de faciliter
l'accès à la connaissance et de favoriser son partage. Le CA de l'université
Paris 7 - Denis Diderot, qui peut s'enorgueillir d'une longue tradition de
coopération scientifique avec les institutions d'enseignement et de
recherche des cinq continents, formule le souhait que tous, partout,
respectent et fassent respecter ces valeurs fondamentales de la communauté
scientifique internationale.

Fidèle à sa tradition d'ouverture, de dialogue, convaincu que le savoir est
la meilleure arme contre l'extrémisme et l'obscurantisme, le CA de
l'université Paris 7 - Denis Diderot se détermine en faveur d'un
renforcement des accords avec toutes les universités a travers le monde."

 

...  Articles de presse remarqués 
: Dominique Chouchan, professeur associé à Paris-VII

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