L'appel au dialogue
 Une conférence de Dalil Boubakeur 
et Bernard Kanovitch

       Pour Dalil Boubakeur, L'antisémitisme résulte d'une identité d'emprunt d'une jeunesse à la dérive, c'est une crise circonstancielle opposée aux intérêts des musulmans qui demande emploi et paix sociale.  La starisation de Tariq Ramadan est une lourde erreur. Les médias manquent d'un "conseil de l'ordre" chargé de veiller au respect de la déontologie de leur métier.

 

Dalil Boubakeur

 

 

     Publié le 14 décembre 2003

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      Jeudi soir,  le MJLF organisait une rencontre entre Dalil BOUBAKEUR, recteur de la grande mosquée de Paris, président du conseil représentatif des musulmans de France et Bernard Kanovitch président de la commission des relations avec l'Islam au CRIF.  

        La conférence  commençait à 20 h 30, et, en retard comme d'habitude, après avoir trouvé une place miraculeuse réglementaire, je me précipitais vers l'entrée de la synagogue où se tenait un petit attroupement. Le service d'ordre filtrait les retardataires, et cette fois, il n'avait pas fait dans la dentelle, on avait apporter pour l'occasion un portique comme on en trouve dans les aéroports qui faisait dring dring à chaque pièce trouvée. Étant habitué des lieux, on ne m'a pas trop importuné, car ceux qui me connaissent savent que je suis capable de fuir une sécurité trop bête ! 

      A l'intérieur l'assistance était correcte, environ 300 personnes dans une salle en contenant 500, ce n'est pas si mal pour entendre des modérés. Un conférence de Jean Marie Le Pen,  ou de Tariq Ramadan aurait sûrement fait d'avantage salle comble.

   «Le Conseil Représentatif du Culte Musulman que je préside» disait Dalil Boubakeur lors de mon entrée dans la salle ne représente pas les musulmans, mais est chargé d'assurer le culte, de s'occuper des cimetières, de la viande Hallal, d'assurer les prières etc.. Nous avons beaucoup à apprendre sur la façon dont le judaïsme s'est organisé, et s'est intégré. Pour nous aussi "La loi de l'État, c'est notre loi"  . 

   Notre relation à l'État s'appuie sur ce principe, même si nous avons des divergences vis à vis du foulard, nous voulons être légaliste. « S'il y a une loi, nous l'appliquerons ! »

  Que pouvez vous dire sur le CRCM dont la composition inquiète ?

    L'islam passe par une mauvaise image due à la radicalisation et à la politisation. Le Wahabisme est  un mouvement politique qui se sert de la religion, les Frères Musulmans ont fait une collusion avec le Wahabisme.  Pour eux, "le pouvoir est au bout du tapis de prière ! "
C'est une manière de manipuler les foules, leurs objectif est un affrontement de civilisation dont l'évolution nous inquiète. 
    
    Pour lutter contre ces gens là, il faut s'attaquer aux vrais problèmes, le chômage, en France il est de 10 % mais chez les musulmans il atteint 30 à 40 % . C'est de là que part l'islamisme, comme un feu de broussailles, les prisons sont des écoles islamistes. 
Le problème est d'insérer, de donner une espérance à la jeunesse. Si vous employez nos jeunes, vous extirpez le terrorisme.  L'État semble léger  il laisse faire ceux qui distribuent la drogue anesthésiante du fondamentalisme.

  Monsieur Kanovitch quelles sont les relations du CRIF avec le CFCM ? 

     Je suis très heureux d'être à côté de mon ami, de mon proche, nous avons un grand besoin de nous connaître, car nous juifs ne connaissons pas assez la communauté musulmane. Cette communauté fait peur, il y a confusion entre voyous des banlieues et une des religions du livre. C'est une communauté d'immigrés, comme la communauté juive. (*)  Il y a 1500 lieux de culte et 90 imams dépendant du CFCM, c'est très peu.

    Le CFCM va organiser l'islam de France, qui est spécifique. L'islam Allemand est turc, l'anglais pakistanais, et le français vient surtout d'Afrique du Nord. Il nous a fallu 2000 ans de coexistence et 200 ans de citoyenneté pour régler nos problèmes avec les chrétiens, il faut comprendre que l'intégration de l'islam ne puisse pas se faire en un jour ! 

    En attendant, il faut aider à l'intégration, sinon c'est la communauté nationale qui en fera les frais. Aujourd'hui nous n'avons d'autres choix que la compréhension et nous ne sommes pas démuni car les pouvoirs publics sont là. .  

Monsieur Boubakeur l'Islam est il étranger à la civilisation européenne   ? 

    L'église et le judaïsme était présents en Arabie avant l'Islam, où coexistaient des gens plus ou moins poli-théistes ou de tradition Abrahamique. Or l'Église a eu une histoire mouvementée, en 325 au concile de Nicée I (325) elle déclare que Dieu s'est fait homme en la personne de Jésus-Christ, qui est donc «fils de Dieu». Lors de ce concile, le symbole de Nicée est défini et l'arianisme, selon lequel Jésus n'est pas divin, est condamné pour la première fois. Les Ariens chassés se réfugient dans le désert. Au concile d'Éphèse (431)
Jésus est Dieu et né de Marie; celle-ci est donc «mère de Dieu». Condamnation des nestoriens qui nient cette proposition et croient que Dieu est venu «habiter» Jésus, fils de Marie. Les Nestoriens se réfugient en Arabie. Au concile de Chalcédoine (451) Jésus-Christ est pleinement Dieu et pleinement homme: il y a deux natures en une seule personne, ce que nient les monophysites, condamnés par le concile. Ces derniers fuient. 

    Les déserts d'Arabie au temps de Mohamed était donc plein de chrétiens divers mais en délicatesse avec l'Église officielle. Le Coran a repris les grandes lignes des messages juifs et chrétiens et à fait une synthèse facilitée par la division des chrétiens. 

     La civilisation islamique s'est donc nourrie dès l'origine des cultures judéo-chrétiennes, et ces échanges ont été très fructueux jusqu'à la fermeture dogmatique de l'Islam.
      Aujourd'hui le modèle d'intégration juif plait aux musulmans qui cherchent à s'y identifier. 

Que faut-il penser du communautarisme ? et que pensez vous du voile Islamique ?

      Toute religion est celle d'une communauté, la loi de 1905 sépare la structure religieuse de l'État. Il faut être clair, l'État est laïque, pas la rue ! Le communautarisme est né d'une vision d'un statut personnel basé sur la religion.

         Le communautarisme n'est pas de la tradition française qui reconnaît seulement l'individu. Nous, musulmans, préférons que le gouvernement ne légifère pas sur le voile,  comme les représentant des autres religions, il faut laisser de la souplesse.  C'est dans les excès communautaires que naissent les intégrismes, comme on peut en voir de tristes exemples en Grande Bretagne.

      Bernard Kanovitch ne voit aucun obstacle à une allusion aux religions dans la constitution. "Je pense", dit il, "qu'on ira vers une loi, car les opinions le veulent", mais le législateur sera à plaindre, il faudra faire attention à ce que la loi ne soit pas pire que l'absence de loi ! 

          Le voile à l'origine vient d'une prescription religieuse du Coran, on le trouve dans deux sourates, au cours du temps il a été plus ou moins appliqué, à partir du XX ième siècle, ne pas le porter est devenu le symbole de la modernité. Son refus était venu d'Iran et de Turquie, et de Tunisie.
        Son retour vient également d'Iran, mais on s'en sert pour conquérir le pouvoir. Le voile n'est pas que religieux ! 
           Le FIS en Algérie a égorgé des malheureuses qui refusaient de le porter, l'Europe y donc vu un problème. 

Comment voyez vous les relations entre la communauté juive et l'Islam en France ? 

         Il n'y a pas de mot d'ordre dans le monde musulman d'agir contre la communauté juive, je n'ai entendu que des discours de respect. La diplomatie cherche à préparer la paix, et dans les ambassades arabes beaucoup croient en une possibilité fructueuse de  coopération avec Israël et la communauté juive. 
         
Ce qui se passe dans les banlieues relève de mentalités de frustrés que nous n'avons pas de peine à condamner. 
       Il y a en France un courant constant de xénophobie, et les mosquées ne sont pas épargnées, l'antisémitisme est circonstanciel et non porteur d'avenir. Tous les responsables religieux ont intérêt à maintenir la paix.

        On demande en plus à la religion d'apporter des solutions à des problèmes qui ne sont pas religieux mais sociaux. Les problèmes sont sont le chômage, l'espérance, et je rend hommage aux gouvernants qui prennent conscience du problème. Pourtant on nous appelle comme des pompiers pour résoudre des problèmes qui ne sont pas les nôtres, par exemple pour lutter contre l'antisémitisme qui résulte d'une identité d'emprunt d'une jeunesse à la dérive. par ce que des jeunes se cherchent, ils s'imaginent Palestiniens, et prennent les autorités françaises pour des forces d'occupation !   
    

      
Les mosquées peuvent être un lieu de dialogue, il nous faut des imams formés en France, à l'islam de France. Le dialogue doit dépasser le cadre des difficultés circonstancielles. 
 
      
N
ous essayons d'exprimer nos idées démocratiques à des gens qui n'acceptent pas ces idées, je sais que je risque gros, la solitude c'est celle de ceux qui aiment la paix.  Nous sommes isolés, par ce que nous sommes à l'avant garde, le bien seul est universalisable. L'islamisme est aussi dangereux pour les musulmans modérés. 

      Que Tariq Ramadan se mêle de ses affaires ! les médias français en font une super star !  est ce que c'est M Ramadan qui sera chargé de résoudre les problèmes en France ? 
      
Ce qu'il manque le plus au monde des médias c'est une déontologie. Il faudrait créer une sorte de conseil de l'ordre des journalistes chargé de veiller au respect de la déontologie qu'ils sont sensés respecter.  On a raison de comparer M Ramadan et M Le Pen, ce sont deux fascismes. Lors du Forum social Européen, l'accolade entre José Bové et Tariq Ramadan pose un problème à toute la France. 

La modernité doit-elle s'adapter à la religion ou l'inverse ? 

       Laissons le sacré au sacré, et ne confondons pas rationalité et religion.  Quand on étudie la science on doit ignorer la religion, et réciproquement, on est pas dans le même univers, l'explication du Coran n'appartient qu'au Créateur.          


     (*) A ce moment, M Kanovitch demande à la salle "Qui parmi vous n'est pas fils ou petit fils d'immigré ? Très peu de main se lèvent, dont la mienne, mes voisins refusent de me croire...  ils ne peuvent pas s'imaginer qu'on puisse être juif de racine française  !   cela montre l'évaporation par assimilation des juifs français qu'ils soient du comtat, de Bayonne ou d'Alsace
   


Le judaïsme libérale se montre très ouvert.  Il est  à la pointe des amitiés  judéo-chrétiennes  ou judéo-musulmanes Son rabbin milite aussi au côté des mouvements  israéliens cherchant une paix de  compromis.

 

 

 

 

 

 

 

L'appel au Dialogue,
 les auteurs sont
les conférenciers

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

M Kanovitch est
membre du CRIF
et président
de la commission
chargée des
relations avec
l'Islam

 

 

 

Les Athées...
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