Mivy décoiffe, car il est fait par un chauve

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Derière mise à jour 25-Fév-2024
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Pie XII, l'ambigu

Pie XII était un diplomate né, pacifique, il vécu dans sa chair les drames du XX ième siècle, la révolution spartakiste à Munich l'a rendu violemment anticommuniste, au point de considérer la Wehrmacht comme un rempart contre le bolchevisme. Antisémite par tradition, il a été horrifié par le nazisme, et a cherché à sauver des vies tout en veillant à la sécurité de l'église qu'il savait menacée. Sa prudence n'a pas toujours été comprise.

Premiers contacts avec l'église catholique

Je suis né en 1944 à Lausanne, et dès 1945, tout bébé, j'ai rejoins la grande famille, à Besançon, avec ma maman, mon frères et ma sœur. Nous habitions tous une belle maison de maître avec un beau jardin. C'était la république des enfants, seule adulte rescapée, une tante paralysée dans son lit, les autres adultes étaient morts, en déportation, ou de maladie avant guerre, en laissant toute une tripotée d'adolescents et de petits, qui animaient la maison, et je faisais partie des petits.

Un muret séparait notre maison de celle de nos voisins, leur riche demeure régnait au milieu d'un autre beau jardin, où de nombreux enfants, bons chics, bons genres s'amusaient souvent. En grandissant, j'aimais jouer dans le jardin, et nous, les petits, nous bavardions, avec nos petits voisins, nous étions penchés accoudés sur le muret qui séparait les deux propriétés, nous en haut, et eux en bas.

Les discussions étaient amicales, un après midi, un enfant d'en bas, m'a expliqué, tout fier de lui, qu'il irait un jour au paradis, mais que moi, je ne serai pas accepté, car j'étais juif et que je ne croyais pas au petit Jésus.

Ce fut un chagrin immense, je rentrai chez nous en pleurant à chaude larme, toutes les demoiselles de la maison sont venues me consoler, en m'expliquant que je m'appelais Michel, et que Michel était un archange, et qu'il était toujours au côté du bon Dieu, c'est à dire à la meilleure place du paradis. J'ai appris plus tard que nos voisins, si catholiques, habitaient la maison d'une famille juive qui avait été déportée.

Ma première rencontre avec le christianisme, n'était pas très encourageante, et j'ai ressenti l'église comme un monde étranger plutôt hostile.

A l'adolescence, je suis parti habiter à Troyes chez mon papa, et il m'a beaucoup parlé de l'affaire Finaly. Sous l'occupation, se sentant menacés, les parents Finaly avaient confié leurs enfants à une institution catholique. Ces enfants ont été baptisés, et élevés dans la foi catholique. Les parents furent déportés, mais une tante habitant l'Australie est partie à leur recherche. L’Église refusa de les rendre, disant que le baptême était irréversible, et qu'ils ne pouvaient plus retourner dans un milieu Juif. Pendant des années, les enfants furent enlevés, cachés dans des couvents en Espagne, protégés par Franco, et le pape Pie XII, n'avait jamais répondu aux supplications de la famille. Ce n'est qu'en 1953 que l'église fit le nécessaire pour suivre les décisions de justice, alors les enfants Finaly furent rendus à leur tante. Cela n'a pas amélioré ma sympathie pour le souverain pontife.

J'avais 19 ans, lorsque sorti la pièce de théâtre, "Le Vicaire", de l'allemand Rolf Hochhuth. Cette pièce mettait au pilori Pie XII. On l'accusait d'une part d'être au courant des horreurs commises par les nazis contre les juifs, et surtout son refus de condamner explicitement le nazisme, et les atrocités anti juives. Pie XII était présenté comme coupable de «refus d'assistance à personnes en danger» sans circonstances atténuantes.

Un ou deux après, j'ai dirigé un camp d'Éclaireurs Israélites de France dans le Jura, à Beaulieu. Le camp était vide ce jour là, car les jeunes étaient partis en "explo", (trois jours où les jeunes doivent suivre un périple précis, enquêter, découvrir, et se débrouiller sans animateurs à leurs côté). Ce jour là, j'ai vu arriver dans notre camp un prêtre, avec des journaux sous les bras. Il s'est présenté, c'était le curé de Bonlieu, et il souhaitait offrir les journaux à nos éclaireurs. J'étais bien sûr méfiant, pourquoi un curé voudrait-il offrir des saintes lectures à des éclaireurs juifs ? enfin je l'ai remercié, en me réservant le droit de les distribuer ou non en fonction de leur contenu. Puis nous avons discuté, et dans la violence de mes vingt ans, je lui ai dit tout le mal que je pensais de Pie XII, il a tenté de le défendre, puis m'a dit, "mais enfin vous ne pouvez quand même pas juger Pie XII !" et je lui ai répondu, "Mais je ne suis pas le juge, je suis le procureur ! " .
En me disant au revoir, le curé m'a dit "J'espère que vous vous souviendrez du curé de Bonlieu" , et bien c'est fait cinquante ans après, je me souviens bien de lui.
Les journaux étaient sympathiques et inoffensifs ils ont été diffusés aux ados.

Puis j'ai fait des études de sciences économiques à Dijon, et je me suis fait un ami, on en a pas tellement dans la vie ! Germain était un militant catholique de choc, il l'est toujours d'ailleurs, et cinquante cinq ans après nous sommes toujours amis.

Au cours des années, il s'est fait le brillant avocat de Pie XII, il m'a forcé à réfléchir, et à me poser de bonnes questions :

- Pie XII n'a pas parlé, et n'a pas dénoncé les crimes antisémites, ni averti les populations juives du danger les menaçant alors qu'il était au courant et avait des relais capables d'agir. C'est vrai, mais était-il le seul ? Que dire du silence de Churchill, de Roosevelt et de De Gaulle ? Pourquoi n'accuse-t-on que le pape ? ? On a appris que Rolf Hochhuth aurait été un agent de la STASI, police politique Est-Allemande, et que le but de sa pièce de théâtre était de décrédibiliser la papauté, afin de combattre la puissance de l'Église qui menaçait le régime communiste polonais.

- Pie XII pendant toute la guerre était prisonnier des fascistes italiens, puis des nazis, de quelle liberté jouit un prisonnier ? Une prise de parti trop franche aurait mis en danger non seulement son pouvoir, mais aussi l'ensemble du clergé. Or on sait que les églises et monastères ont sauvé des milliers et des milliers de personnes, auraient-t-elles pu le faire si les nazis avaient traqué l'église catholique en considérant le pape comme un ennemi personnel ?

Aujourd'hui, je participe à l'animation des amitiés judéo-chrétiennes de Dijon, et lorsque le père Raphaël Clément a souhaité que notre prochaine réunion porte sur la lettre de Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse qui a protesté il y a quatre-vingt ans aujourd'hui, en risquant sa vie, contre les persécutions visant les juifs, j'ai sauté sur l'occasion, et lui ai proposé de compléter son exposé, et de parler de Pie XII, ne serait-ce que pour m'imposer de mieux connaître et comprendre ce personnage.

Eugène Pacelli avant Pie XII

Eugenio Pacelli, le futur Pie XII, est née dans une famille aristocratique noire de Rome, en 1876. Sa famille militait contre l'état Italien, il faut se rappeler qu'en 1870 l'Italie a confisqué les états du Pape, en réduisant ces états à un petit quartier de la ville éternelle. Cela ne plaisait pas à l'aristocratie noire.

La tradition familiale était conservatrice. Il a fait de très brillantes études, au collège Capranica qui forme les futurs diplomates de la curie. Il a commencé sa carrière aux ordre d'un secrétaire d'état du Vatican (ministère des affaires étrangères) et a vite été reconnu pour ses compétences.

Il s'est fait remarqué très jeune, par ses compétences juridiques et linguistiques, si bien, par exemple, qu'il a représenté le Pape Léon XIII aux funérailles de la Reine Victoria en 1903. Il a été le fidèle serviteur de plusieurs papes,Léon XIII (1878-1903), Pie X (1905-1914), Benoît XV (1914-1922), Pie XI (1922-1939). Il régnera de 1939 à 1958 et Jean XXIII lui succédera

En 1917, il est nommé nonce apostolique en Bavière, à Munich; il n'y a pas d'autres nonces en Allemagne. Le Vatican a un faible pour l'Allemagne, en raison de son hostilité à la politique laïque de la France, et Pacelli a toujours milité pour la neutralité du Vatican dans l'horrible guerre qui déchire l'Europe. Il serait derrière la proposition du Pape pour une paix anticipée, basée sur un retour à la situation avant 1914. Ce projet fut rejeté et par la France et par l'Allemagne. Par contre le Vatican a eu plus de chance dans des efforts pour favoriser l'échange de prisonniers.

C'est à Munich qu'il vivra le moment le plus traumatisant de sa vie, les révolutionnaires spartakistes, bolcheviques, l'ont menacé de leur fusil, il a été terrorisé, et en a fait une dépression nerveuse qui l'a conduit à être hospitalisé. De cette période date probablement son aversion et sa peur du bolchevisme, ainsi que son anti communisme viscéral, qui le mettra plus tard dans des situations psychologiques intenables.

Il a été le bras droit du pape Pie XI, sa connaissance intime de l'Allemagne ont fait de lui un collaborateur efficace, apprécié et irremplacable. Diplomate dans l'âme, Le cardinal Pacelli a été nommé "secrétaire d'état", c'est à dire ministre des affaires étrangères du Vatican en décembre 1929. Il a négocié plusieurs concordats, fixant les relations entre l'église et l'état, avec la Bavière, le Pays de Bade, la Lituanie, l'Italie.

Le pape était hésitant face à Hitler, prônait-il le paganisme ? ne risquait-il pas d'opprimer l'église ? toutefois, il était le meilleur bouclier possible contre le bolchevisme, et sans Hitler, l'Allemagne risquait de tomber entre les mains des spartakistes. Le 7 mars 1933, Pie XI déclarait « J'ai modifié mon opinion sur Hitler à la suite du langage qu'il a tenu ces jours ci sur le communisme. C'est la première fois, il faut bien le dire, que s'élève une voix d'un homme de gouvernement pour dénoncer le bolchevisme en termes aussi catégoriques et se joindre à la voix du pape »

Von Papen, politicien catholique de droite, (Parti Zentrum) anticommuniste, voulait être chancelier, il a tenté un coup de poker en s'alliant aux nazis, ami de Mgr Pacelli, il a facilité la prise de pouvoir des nazis. Von Papen a été la courroie de transmission entre les nazis et l'église, et un informateur précieux de Pie XII.

Rassuré par la présence de Von Papen, le Vatican n'a vu dans un premier temps qu'un changement de gouvernement, et a signé en 1933, un concordat avec le nouveau chancelier Hitler. Hélas, dès leur prise de pouvoir, les nazis ont multiplié les exactions et les crimes. Hitler n'a pas respecté cinq minutes le concordat, et la nuit des longs couteaux a convaincu Pie XI et Pacelli du danger nazi. Rapidement le Vatican est convaincu qu' « on ne peut pas négocier avec Hitler, qui ne respecte rien» Par contre il est nécessaire de s'en protéger.

Pie XI, a vu la montée du paganisme chez les nazis, il a vu le camp de Dachau se remplir de prêtres, il a publié le 10 mars 1937 une encyclique "Mit brennender Sorge" (avec une inquiétude brûlante), rédigée avec le cardinal Pacelli, et qui fut lu dans toutes les églises du Reich. Cette encyclique courageuse, rappelait que les principes de la chrétienté n'étaient pas compatibles avec beaucoup de décisions nazies. Quasiment en même temps, il publie une autre encyclique encore plus virulente, contre le bolchevisme.

Le pontificat de Pie XII

L 'élection du Pie XII, en 1939 fut très rapide ! le conclave le plus rapide de l'histoire ! car, il était le dauphin de Pie XI qui souhaitait son élection. Contrairement à son prédécesseur,  Il ne voulait à aucun pris apparaître aux yeux de Mussolini ou de Hitler comme un ennemi. Il se murmure dans les chancellerie, et au sein de la Gestapo que Pie XII comploterait avec des allemands dans le but de renverser Hitler.

A cette époque, l'église était anti-judaïque, elle se présentait comme le verus Israel, et considérait que le baptême était la seule source de salut pour l'âme. Les juifs étaient présentés comme preuve de la déchéance de ceux qui n'avaient voulu reconnaître le sauveur.Les mesures antisémites prises par Mussolini, Hitler ou Pétain n'ont provoqué aucune réaction. Voir les Juifs réprouvés, et victimes de leur aveuglement spirituel devait sembler logique aux tenants de ces théories. Il n'y avait aucune vision raciste dans cette position, et les convertis étaient les bienvenus dans l'église.

Toutefois, les assassinats, les déportations n'étaient pas tolérables et étaient contraires à la morale chrétienne. Pie XII n'aimait ni Hitler ni les nazis, lorsque le Führer est venu à Rome voir Mussolini, le pape s'est fait porter malade, et a quitté précipitamment Rome.

Le 26 juin 1943, Radio Vatican dans un message à dimension religieuse proche d'une excommunication indique que «  quiconque établit une distinction entre les Juifs et les autres hommes est un infidèle et se trouve en contradiction avec les commandements de Dieu. La paix dans le monde, l'ordre et la justice seront toujours compromis tant que les hommes pratiqueront des discriminations entre les membres de la famille humaine ».

Pie XII se serait plusieurs fois livré à des exorcisme à distance à l'égard d'Hitler, témoignant de la conviction du souverain pontife que le dictateur nazi était non seulement un criminel mais qu'il était, au-delà, possédé par le diable.

Pie XII était parfaitement au courant des atrocités qui se déroulaient en Pologne, et ailleurs dans les territoires occupés, il les condamnait sans resserve en privé, mais en même temps, il pensait que l'armée nazie était le bouclier qui protégeait l'église du péril bolchevique. Il ne fallait pas porter tort à la Reichswehr ! !

Aussi, lorsqu'en 1941 Konrad von Preising, évêque de Berlin lui écrit : « Votre Sainteté est certainement informée de la situation des juifs en Allemagne et dans les pays voisins. Du côté protestant comme du côté catholique, on me demande si le Saint-Siège ne pourrait pas lancer un appel en faveur de ces malheureux

Pie XII ne répond pas. Des supplications du même genre, avec la même réponse parviennent de plusieurs hauts dignitaires de l’église, par exemple du nonce à Bratislava, ou le représentant de l'église en Croatie.

En mars 1943, Konrad von Preising lance un appel désespéré pour que le pape essaie quelque chose pour sauver la vie des innocents, et le 31 avril, Pie XII lui répond "

«  Il appartient aux évêques locaux de dire quand il faut être silencieux et quand il faut parler, compte tenu des risques de représailles. »

En effet, une lettre pastorale signée par plusieurs évêques, dont l’archevêque  d’Utrecht, pour dénoncer publiquement la déportation des juifs hollandais –  fut lu le 26 juillet 1942 dans toutes les églises de Hollande.  Seyss-Inquart, responsable de la Gestapo ordonna la déportation immédiate à l’Est de tous les Juifs convertis à la religion catholique, et ordonna de fouiller tous les monastères afin de traquer les juifs qui pourraient s'y trouver. Nous assistons au martyrologe des moines et des nonnes d’origine juive, en particulier à celui d’ Edith Stein. Les responsables protestants n'ayant pas agit ainsi, aucune initiative ne fut prise pour traquer les juifs convertis au protestantisme.

Environ 250 juifs christianisés furent arrêtés et probablement tous assassinés, on est très loin des 40 000 annoncés par les défenseurs de Pie XII. Ce chiffre avait servi d'alibi pour justifier la prudence du Vatican. (*) . Quelque soit le nombre de victimes suite à cette lettre pastorale, les nazis ont exterminé 90 % des juifs hollandais, malgré la sympathie traditionnelle qu'avaient les hollandais chrétiens vis à vis de leur communauté juive.

Pie XII a tout fait pour protéger l'église catholique dans les territoires occupés par les nazis. Il faut avoir en mémoire que dès 1936, il y avait des milliers de prêtres internés à Dachau, et sa hantise était l'assassinat de tous les prêtres catholiques des territoires occupés par le Reich. Ce projet existait dans les cartons des maîtres de Berlin.

Lorsque "sous sa fenêtre" le  16 octobre 1943; la Gestapo, a donné l'ordre d'arrêter tous les juifs de Rome, Pie XII est intervenu, pour demander qu'on libère les juifs convertis au catholicisme, ce qui fut fait. Les autres auraient été déportés. Jacques Nobécourt, historien donne une autre version. « Le pape n'avait convoqué l'ambassadeur allemand que pour éviter de devoir protester publiquement et son secrétaire d’État, Mgr Maglione, l'avait même prié de ne pas transmettre de télégramme de protestation à Berlin. Deux heures plus tard, la rafle est suspendue et 4.000 juifs de Rome trouvent asile dans des couvents et collèges».

Cette version est fausse, le pape n'a rien pu faire face à la rafle organisée à son insu, les contacts entre les allemands et le pape, ont eu lieu après les déportations. Mais le pape, a agit. Le dimanche  17 octobre, un fonctionnaire du Vatican se rendit au Collegio Militare, se limitant à demander la libération des Juifs baptisés. Cette requête fut rejetée car, sur la base de la législation allemande en vigueur à l'époque, les Juifs convertis appartenaient toujours à la race juive. Le pape a ordonné que des réfugiés politiques et des Juifs soient abrités dans le couvent romain des Santi Quattro Coronati.

Durant cette triste période, on ne connaît pas de cas où on accuserait Pie XII de s'être opposé à des responsables catholiques qui auraient protégé ou caché des juifs pour les soustraire à leurs persécuteurs.

Et après la guerre

Eugénio Pio Zoli ancien grand rabbin de Rome s'est converti au catholicisme, suite à une vision lors d'une prière de Kippour et a pris le nom du pape, pour lui rendre hommage, Golda Meïr aussi a vanté ses mérites, « un grand serviteur de la paix, une voix qui a enrichi notre temps parce qu'elle rappelait des vérités morales au dessus du tumulte des conflits quotidiens».mais faut-il croire une louange diplomatique ? Israël tenait à établir des relations diplomatiques avec le Vatican, et pour cela devait être diplomate.

Jules Isaac, historien français, quo-auteur des célèbres manuels à usage scolaire "Mallet et Isaac", qui ont bercé ma scolarité, a beaucoup réfléchi sur le drame de la shoah, et a conclu que si cela avait été possible, c'est en raison de « l'enseignement du mépris », l'antisémitisme religieux faisait partie des dogmes enseignés par l'église. Jules Isaac était convaincu que c'était du à une mauvaise interprétation des évangiles, et à des circonstances historiques. Aussi a-til entrepris de convaincre le Pape, de la nécessité de bouleverser l'enseignement du catéchisme afin d'éviter que de telles horreurs ne puissent se reproduire. Il obtient de Pie XII, après la conférence de Seelisberg, que la réforme liturgique de 1955 supprime l'« offense du geste », c'est-à-dire l'omission de l'agenouillement lors de la prière pour les Juifs, mais l'« offense des mots », avec l'adjectif « perfides », reste inchangée jusqu'à Jean XXIII.

Le pape François vient de décider d'ouvrir toutes les archives personnelles de Pie XII aux historiens. On apprendra rien de fondamental, mais la lecture de ses correspondances personnelles, les modifications de projets de textes, montreront les hésitations, et apporteront des lumières pour ceux qui souhaitent interpréter dans le bon sens les choix d'un homme qui a vécu une période extraordinairement compliquée et dramatique. Il faudra des années avant que le dépouillage comptait des millions de documents soit terminé.

"Mivy" a vingt ans, et je n'ai jamais rien écrit sur une personnalité aussi clivante que Pie XII, Il est en attente de canonisation, on attend de trouver des miracles qu'on puisse lui attribuer, et dans l'esprit de beaucoup d'autres, il fut lâche, et à la limite complice d'Hitler. J'ai essayé de montrer ici un homme déchiré, de son temps, qui pour moi ne mérite ni l'excès de louanges, ni l'excès d'insultes. Qui sommes nous pour le juger ? Avons nous été à sa place ?

Michel Lévy